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03/06/2014 - Article

Arduino, l'électronique open-source

par Arthur Dayras, DIY Manifesto

Un circuit électronique low cost devenu mouvement citoyen


La révolution DIY passe aussi par l’électronique et l’informatique. Depuis neuf ans, celle-ci a pris un essor considérable grâce notamment à un apport révolutionnaire : Arduino. C’est dans un laboratoire de l’École de Design d’Interaction d’Ivrée en Italie, qu’une équipe d’étudiants et de professeurs exaspérés par le prix des composants électroniques, met au point un circuit électronique low-cost baptisé Arduino. Le projet s’inspire des travaux avancés du jeune Hernando Barragan et de sa carte électronique librement programmable Wiring

Arduino : maléable et open-source

Arduino n’est autre qu’un circuit imprimé sur lequel se trouve un microcontrôleur, programmable par un logiciel et utilisable dans une variété infinie de cas de figure. Simple circuit électronique, Arduino est malléable selon les envies. Isolé, il est inutile. Il développe sa potentialité qu’une fois les éléments électroniques ajoutés un à un : bouton poussoir, led, moteur, wifi... Il suffit ensuite d’ajouter un code, disponible sur les sites de partage fréquentés par les « arduinistes ». Une fois la programmation et les branchements effectués, Arduino ouvre tous les champs des possibles.

La force de ce circuit repose sur la notion de communauté et d’open source. Entendre par là que son utilisation est gratuite, ouverte à tous. Chacun peut contribuer à l’amélioration du logiciel, qui n’appartient à personne. Ainsi, les adeptes d’Arduino partagent des tutoriels libres d’accès sur Instructables ou Youtube.

Sans n’avoir moi-même jamais touché à Arduino, j’ai pu faire clignoter une simple led en trente minutes. Il m’a suffit d’un bon professeur, en la personne de Quentin Chevrier du laboratoire d’art numérique et électronique Digitalarti à Paris (10e) et d’un tutoriel bien écrit. Sauf que, à quoi bon faire clignoter une led ? 

Un outil réservé aux initiés ?

C’est bien là que les bienfaits d’Arduino divisent. Pour Quentin Chevrier, son utilisation nécessite une bonne connaissance de l’électronique et de la programmation, réservée à un groupe d’initiés. Mais ce praticien du DIY ne nie pas la force intrinsèque d’Arduino : sa communauté. Celle-ci permet de compléter les lacunes des utilisateurs grâce à un réseau d’entre-aide efficace en ligne comme hors ligne.

Manager du FacLab de l’Université de Gennevilliers, pour Chloé Duc la communauté qui gravite autour d'Arduino permet d’outrepasser la méconnaissance de la programmation. « Il arrive souvent qu’une personne n’ayant jamais touché à Arduino vienne nous voir et annonce vouloir construire une imprimante 3D (ndlr : une RepRap, la première imprimante 3D auto-réplicable). Grâce aux tutoriels mis en ligne par la communautéle néophyte peut suivre de A à Z un mode d’emploi qui le guidera dans la construction d'une imprimante en quelques jours. C’est merveilleux et très ludique ! » Enfants comme adultes, débutants comme avertis, peuvent se lancer avec les premiers tutoriels en 90 minutes.

Ce circuit imprimé low-cost est une petite révolution. Alors qu’il fallait minimum un bac + 3 pour comprendre la mécanique et l’informatique, il est désormais possible d’acquérir les bases en moins d’une heure, puis de complexifier à mesure que l’on progresse. On apprend sur le tas, et surtout on crée ce dont on a besoin. On fait soi-même un objet qu’on a pensé et réalisé de A à Z. « Il n’est pas rare de voir des enfants de dix ou douze ans venir bidouiller un circuit électronique pendant leurs récréations » s'amuse Chloé Duc, pour qui, Arduino a réellement pesé dans la révolution DIY.

Un révolution citoyenne

« Arduino était réservé auparavant aux geeks. Mais sa facilité d’accès et son assise communautaire l’ont transformé en initiative citoyenne ». Tout comme le mouvement DIY en général, Arduino permet de créer un bien unique en son genre, taillé pour le besoin particulier de l’utilisateur. Ce bien n’est pas manufacturé, il n’alimente pas le marché de la consommation mais crée un marché unique. Le bien, adaptable et transformable, peut néanmoins devenir un objet répandu, à chaque utilisateur d’y pourvoir.

Si Arduino fut inventé par une équipe d’étudiants en design, ses applications sont infinies et ses utilisateurs sont issus de tous milieux. Il sert ainsi l’art numérique, la mode, le design ou l’ingénierie. Digitalarti a par exemple collaboré avec l’artiste Jason Hook pour mettre au point une œuvre étonnante, Lulu White. Autres initiatives remarquables : Frida V est un petit boitier GPS pour vélo retraçant le parcours de l’utilisateur, la qualité de l’air et filmant son parcours, RepRap l’imprimante 3D ou enfin l’Eyewriter, un système de dessin numérique pour personne paralysée se basant sur le mouvement de leurs yeux. Les utilisations d’Arduino sont multiples, simplement (il)limités par les tutoriels à la disposition de tous. Avec eux, les makers ces artisans 2.0 peuvent créer ce que bon leur semble, ou presque.